Archives de décembre, 2010

Buzz.

Il y a quelques semaines je fus averti d’une « affaire » commençant à faire grand bruit dans le Landerneau universitaire : Ali Aït Abdelmalek (AAA), ami, professeur de sociologie et auteur d’un ouvrage sur Edgar Morin publié dans la collection « Les panseurs sociaux », était accusé de plagiat. En fait, sur les 157 pages de Edgar Morin sociologue de la complexité et selon le blog de Pierre Dubois , un autre sociologue, « les pages 84 à 93 de ce livre étaient essentiellement constituées de citations et de phrases recopiées du livre d’Edgar Morin, La méthode. 5 L’humanité de l’humanité. L’identité humaine ». Sapristi ! Dans un premier temps, cette mise en cause ne m’intéressa que médiocrement – d’autres chats à fouetter – mais, assez rapidement, je constatai que la caisse de résonance universitaire avait trouvé là de quoi jouer ; un os à ronger, comme on disait ; un « buzz » comme on dit désormais. J’adressai ainsi un courriel à Pierre Dubois…

Aux autorités scientifiques…

« Bonjour
Je suis Philippe Labbé, directeur de la collection « Les panseurs sociaux » aux éditions Apogée où a été publié l’ouvrage d’Ali Aït Abdelmalek sur Edgar Morin. Egalement sociologue, j’ai publié plusieurs ouvrages dans mon domaine d’investigation, l’insertion des jeunes.
Concernant ce qui est mis en cause, j’imagine qu’AAA saura apporter une réponse convaincante : Ali, que je connais depuis vingt ans, a toute ma confiance, je sais qu’il n’est ni un tricheur, ni un menteur. Qui plus est, connaissant des étudiants de Rennes 2, je peux témoigner de ses qualités d’enseignant… ce qui n’est pas la moindre des choses à l’heure du « naufrage de l’université » (Michel Freitag, avec guillemets).

Découvrant cet article hier sur ce blog, j’y ai également lu un commentaire qui mettait en avant que l’ouvrage d’AAA était un hommage à Morin, pas un travail d’épistémologue. Ce commentaire a disparu ce jour.

Concernant le rôle d’un directeur de collection, je ne le conçois pas comme devant vérifier ligne par ligne si les guillemets ont été ou non mis. J’imagine assez aisément qu’Edgar Morin lui-même, qui a préfacé l’ouvrage, en est médiocrement préoccupé.

Concernant les « royalties », je voudrais rappeler que, si ceux-ci sont perçus par l’auteur, (ce qui n’est pas toujours le cas : j’ai moi-même renoncé depuis mon premier livre aux droits d’auteur et les ai abandonnés à l’éditeur, pour soutenir la qualité de cet artisan), ils ne représentent que vraiment bien peu de choses. Si les 800 exemplaires sont vendus, ce qui serait une aussi excellente qu’exceptionnelle nouvelle, cela représenterait sur la base de 5% de 18 €… 720 €. Certes, le début de la fortune… mais un aussi petit qu’aléatoire début.
J’abandonne aux anonymes contributeurs gardiens du temple l’aussi subtil qu’essentiel débat sur les règles de la méthode, variable « avec ou sans guillemets » corrélée à variable « nombre de lignes », et laisse la conclusion à Edgar Morin : « Les autorités (littéraires, scientifiques, politiques) ne se trompent que sur ce qui est fondamental. Elles apprécient correctement tout ce qui est secondaire. » Avec guillemets… mais je ne sais plus où j’ai trouvé cela. Pan sur le bec ? »

Bénéficiaires : des « on-dit »…

Bien évidemment, l’artillerie des réponses ne tarda pas mais, depuis, j’avais renoncé à poursuivre le « débat » : à l’inverse de beaucoup d’universitaires, je dispose en effet d’assez peu de temps – grosso modo nuits et week-end – et dois être très rigoureux sur l’utilisation de celui-ci. Bref, avec AAA mais cette fois comme directeur de collection, j’étais à jeter aux orties. Alain Quemin (un professeur de sociologie que je ne connais pas) ironisait (« … quand on verra un ouvrage publié aux éditions Apogée, on saura que celles-ci ne voient aucun problème à ce que leurs auteurs pratiquent le plagiat, la contrefaçon ou le copié-collé ») et réfutait l’argument de confiance sur la qualité pédagogique d’AAA, les retours des étudiants étant considérés comme des « on-dit ». Il est vrai que le professorat universitaire est probablement très capable de discourir en docte enseignement sur le feed-back (systémie), la décentration (psychopédagogie), l’économie des besoins (économie) ou « la relation client-fournisseur » (marketing)… tout en ne pouvant imaginer d’être évalué par les pioupious étudiants : ce que je dis, pas ce que je fais… démonstration désolante d’un raisonnement anthropocentré se préoccupant comme d’une guigne de l’évaluation des principaux intéressés… Voilà pourtant des années que ceux qui font de la sociologie hors les murs universitaires sont, eux, évalués par ceux à qui ils s’adressent. Mais il est vrai qu’il s’agit de sophistes et de vulgate…

Assises.

Baptiste Coulmont, un autre sociologue, écrit sur son blog « … quand le directeur de collection considère que sa tâche n’est pas de “relire ligne à ligne”… il encourage ses auteurs à ne pas vraiment écrire ce qu’ils écrivent. Et le livre ne sera pas lu (si tout le monde sait que la collection n’est pas vraiment dirigée et que ce qui s’y publie n’a pas fait l’objet d’une évaluation). Cela s’appelle faire semblant de travailler. » Un saut qualitatif vient d’être franchi : ce n’est plus de la négligence mais de l’incitation au plagiat : j’encourage mes auteurs… De la correctionnelle aux assises.

Etre utile.

Contrairement à ce qui est dit ou, tout au moins, en désaccord avec ceci, le rôle que j’estime être celui d’un directeur de collection n’est pas de brancher son logiciel http://www.vérifieravecousansguillemets.com afin de traquer si les guillemets ont été ou non mis, si les op. cit., id. et ibid. sont académiquement rangés, si les versus, les alii… sont opportuns et, comme ma mémoire est sans aucun doute bien incapable de se rappeler mot à mot tout ce qu’a écrit (ici) Edgar Morin (même si j’ai lu et relu tous les tomes de la Méthode), il ne me reste que la confiance en l’auteur. Ce qui est et restera le cas pour AAA et pour les autres auteurs-res (les directeurs de l’ANDML dans leurs contributions à la réédition du rapport Schwartz, Anne Le Bissonnais…). Mon rôle de directeur de collection – je le rappelle totalement bénévole comme celui d’auteur puisque j’ai abandonné mes droits à l’éditeur (mais j’anticipe la critique : le capital symbolique devient sonnant et trébuchant…) – est d’ouvrir ma collection aux acteurs et auteurs pour que progresse et soit partagée la connaissance, pour une utilité sociale : il s’agit bien de « panseurs » sociaux. Voilà bien longtemps que je considère qu’Edgar Morin devrait être lu et relu par les intervenants sociaux qui y trouveraient bien des ingrédients pour leur professionnalité. Voilà des années que je l’écris dans mes livres, dans mes articles, sur ce blog, que j’y invite lors de mes conférences… L’opportunité de l’ouvrage d’Ali a correspondu à cette conviction. Alors oui, je dois l’avouer, l’utilité d’un ouvrage vaut bien plus pour moi que sa stricte conformité aux règles et canons scientifiques et je suis satisfait de certains tirages – 2000-3000 exemplaires pour mes ouvrages – plus que je ne le serais d’un tirage aussi auréolé d’un « label scientifique » que sa diffusion serait confidentielle.

Idées courbes.

Mais, va-t-on m’objecter, tout ceci ne nous dit pas si il y a plagiat et si, en tant que directeur de collection, je le condamne car, après tout, je pourrais conserver mon amitié pour l’homme et reconnaître la faute. Il faut donc que, de mon côté, je conclue…

Je soutiens AAA de mon affection mais également de mon admiration pour son travail à la fois de pédagogue et de chercheur mais là n’est pas seulement l’objet : à 58 ans, je sais ce que j’ai à faire, je le fais sur la base de l’expérience, je ne reçois de leçon de morale de quiconque – « le problème avec la morale c’est que c’est toujours la morale des autres » chantait Léo Ferré – et n’ai strictement rien  gagner, ni à perdre d’ailleurs, avec l’université. J’exerce le métier de sociologue depuis trente ans, après dix années comme travailleur social. Travaillant il est vrai dans le privé, une SCOP, depuis longtemps, je me suis fait mon opinion – qui souffre quelques exceptions… malheureusement peu – sur la sociologie universitaire nourrie de facile reproduction – Le suicide de Durkheim aux premières et deuxièmes années, parfois aux troisièmes, depuis des décennies – et de iatrogénèse au sens d’Ivan Illich (Némésis médicale, 1981, Seuil), c’est-à-dire se mobilisant pour résoudre les problèmes qu’elle se pose. Sociologue « de terrain », les mains dans la glaise, plus commissaire que yogi mais m’accordant beaucoup de temps à la lecture de celles et ceux qui ont le bénéfice d’un statut que je n’ai ni n’ai jamais eu leur permettant d’être officiellement considérés comme « sachants », j’adopte en tous cas une posture compréhensive – oui, au sens wébérien – hormis avec les tacticiens du pouvoir dont l’essentiel du temps, théoriquement d’enseignement et de recherche, est occupé par la courtisanerie et les intrigues. C’est une banalité absolue que de dire que les stratégies d’acteurs dans les départements de sciences humaines s’apparentent bien plus à l’ambiance d’une bananeraie qu’à celle d’un laboratoire social d’innovations. Bien entendu au sens des peaux de banane pour faire glisser et chuter les « chers confrères ». Cela occupe, on pense en rond et, subséquemment, on a les idées courbes (encore Léo Ferré).

Haute crétinisation.

J’ai écrit quatre ouvrages, soit bien plus que la moyenne des sociologues patentés de la cité savante, et je favorise la publication d’autres auteurs tant je crois que, dans le champ de ma collection, un auteur éveille et révèle des acteurs. J’ai publié des classeurs d’articles dans des petites revues professionnelles, parfois des feuilles de choux associatives ou communales, mais également dans Le Monde, Libération, les ASH, etc. J’ai donc beaucoup écrit et, bien des fois et avec le temps qui fait que l’on incorpore des savoirs jusqu’à en faire les siens – « les idées qui me possèdent » écrit Edgar Morin -, en m’imaginant avoir conçu tel ou tel typologie, avoir construit tel paradigme, avoir ciselé tel concept jusque là notion imprécise… alors que, bien évidemment, je n’avais fait que grimper sur les épaules des géants qui me précèdent. Et alors ? Qui pourrait prétendre à ne pas être et même n’être que le réceptacle de ce qui l’a précédé et qui l’imbibe ? Combien de sociologues prétendent-ils à une construction d’un système explicatif global, d’une matrice paradigmatique ? Aucun. Pas même les plus grands… qui furent « simplement » plus inspirés de ce qui était à leur disposition. Ils ont ajouté la pincée de sel qui transforme le mets. Le savoir n’appartient à personne ou, plus exactement, il appartient à tous et, si je suis ignorant, c’est le début de la connaissance ! C’est dans tous les cas ma posture – je déteste ces copyright de vanité, généralement au terme de textes aussi inversement inspirés qu’ils s’affichent protégés – et elle me vient de l’éducation populaire dont l’université ferait bien de s’inspirer car, s’il faut des gardiens du temple, encore faudrait-il que le temple ne soit pas vide.

Cette histoire de guillemets, tirée en plagiat et, surtout, si je comprends bien, façon de régler un compte sur des élections au CNU (là, je l’avoue, cela m’échappe totalement… ni d’ailleurs ne m’intéresse même si, selon Claude Dubar toujours sur le site de Pierre Dubois, le nœud du problème serait là autour du personnage de Michel Maffesoli) est assez médiocre… j’allais dire « misérable » mais je pondère. Elle m’évoque cette phrase de Morin pour qui les mass media produisent de la basse crétinisation et l’université de la haute crétinisation (Introduction à la pensée complexe, 1990, ESF éditeur).

Penthotal.

Accueillant des écrits d’acteurs aux éditions Apogée, je veille à ce que leurs productions soient robustes, transmissibles et utiles. Je lis et relis leurs ouvrages, les conseille, demande telle ou telle explication et éventuellement modification mais je n’ai ni les moyens, ni les compétences, ni le temps et ni l’envie de passer leurs écrits à l’IRM ou au penthotal anti-plagiat… Nombre de sociologues oints par la cité savante publient chez L’Harmattan qui n’est qu’une édition à compte d’auteur (où contractuellement l’auteur s’engage à acheter n ouvrages…) : qui à ce moment interroge la responsabilité d’un directeur de collection… qui n’existe pas ou, alors, purement formellement pour le prestige ou le capital symbolique ?

Tout ceci, à l’heure où 50% des étudiants en 1ère et 2ème années se retrouvent à Pôle emploi, où les sociologues avec master 2 trouvent péniblement des stages dans des structures et découvrent qu’ils n’ont rien ou presque appris parce que le métier de sociologue aujourd’hui ne s’apprend guère à l’université hormis lorsqu’un professeur a l’audace d’impliquer ses étudiants dans des contrats d’étude.

Une tempête dans un verre d’eau, une iatrogénèse… l’expression d’une « misère intellectuelle en milieu universitaire »… expression qui rappellera peut-être quelque chose à certains : c’était des gens bien loin des conformismes, capables d’organiser « la migration des concepts » (Morin, je ne sais plus où mais j’ai quand même mis des guillemets), indisciplinés… bien, bien loin des âmes pures qui clament et brament à la morale, qui portent l’éthique et la déontologie en banderole et en alimentent leur fonds de commerce. Non qu’il ne faille pas d’éthique ou de déontologie mais celle-ci en forme de procès n’est que le cache sexe d’intentions qui, si elles parvenaient à leurs fins, seraient bien pires que ce qu’elles prétendent bouter. Je préfère les déviants aux gardes rouges car « C’est par la déviance et les déviants que les idées nouvelles arrivent. » (E. Morin, Ma gauche, 2010, François Bourin éditeur)

Canard.

Tout ceci est discutable et sera inévitablement discuté – mais j’ai la peau dure et, dessus, des plumes de canard pour qu’y glissent inopportuns et inopportunités – et, probablement, pourrait être évité en laissant le dernier mot au principal intéressé, le « plagié », Edgar Morin. Voici donc le courriel qu’il a adressé à Ali.

« Mon cher Ali,

Il y a plagiat quand on prend un texte sans citer l’auteur, lequel reste inconnu du lecteur; comme je suis l’auteur que tu traites dans ton livre, il n’y a aucune importance que parmi les phrases citées de moi entre guillemets il y eu ait quelques uns sans guillemets. En plus ces citations n’ont qu’un caractère second et scientifique ou philosophique premier, or je considère que les idées sont des domaines publics. Et surtout je trouve grotesque qu’on te reproche de voler un auteur dont tu fais l’éloge. Tu peux évidemment citer cette lettre.

Je t’embrasse, courage parmi les scorpions; moi je suis presque immunisé de leur venin après tant de morsures.

Edgar »

Il me semble qu’à ce stade on peut conclure par « c’est dit. » En tout cas pour moi.

Suite… et fin?

Bien sûr, la réaction à cette opinion n’a pas tardé. Je publie donc les courriels de Alain Quemin et de Pierre Dubois, puis ma réponse… sachant que deux courriels, deux traitements. Celui d’Alain Quemin étant sommatif voire comminatoire et insultant (« Je soutiens les tricheurs s’ils sont mes amis »), ce professeur de sociologie de Paris Est n’aura le droit qu’au minimum… et c’est déjà beaucoup car il aurait du comprendre que, non universitaire, je n’ai pas plus de comptes à lui rendre qu’à toutes les instances, normes et règles qu’il estime, lui, universelles. Celui de Pierre Dubois m’a fait sourire par son entame laudative et/ou professorale – « {votre contribution} est extrêmement claire et argumentée… » – précédant l’annonce d’un randori – « elle mérite d’être discutée et combattue » -. Après, j’avoue ne pas trop savoir… c’est un peu comme avec le Front National : faut-il se taire au risque d’apparaître sans argument ou faut-il en parler au risque d’ajouter de l’huile sur le feu ou, plus circonstanciellement, tourner la cuillère dans le verre où s’agite la tempête ? On verra…

Alain Quemin. « Pourquoi une si longue tribune ? Votre réponse tiendrait en quelques mots et serait bien plus claire : « Je soutiens les tricheurs s’ils sont mes amis » ! Quant à Edgar Morin, son argumentation est vraiment très faible et méprisante. Et s’il pense que les idées sont parfaitement libres de droits et qu’il n’existe aucun usage qui oblige les universitaires (ou autres) à utiliser les guillemets quand ils « empruntent » (c’est un euphémisme…) les écrits d’autrui, qu’il se montre cohérent en prouvant qu’il renonce à ses droits d’auteur…

Et deux questions toutes simples à votre intention :

– pouvez-vous certifier – après tout, vous êtes directeur de collection, n’est-ce pas ? – qu’aucun autre passage que ceux déjà identifiés et dénoncés sur le blog de Pierre Dubois dans l’ouvrage d’Ali Ait Abdelmalek que vous avez édité ne relève d’une tricherie ?

– s’il apparaît que votre ami a commis d’autres tricheries ou même des plagiats, serez-vous prêt à revoir votre position et à dénoncer ce type de pratique quand bien même il s’agit d’un de vos proches qui bénéficie, comme vous le dites, de votre affection ? »

P.L. « Première question : je peux certifier qu’aucun autre passage ne relève d’une tricherie… pour la (très) bonne raison qu’il ne s’agit pas ici de tricherie mais de négligence. Seconde question : si d’autres erreurs, dans d’autres ouvrages, se révélaient ultérieurement, AAA étant, j’imagine, échaudé, je lui recommanderais de prendre un peu de repos. Plus sérieusement, si je constatais des pratiques contraires à une éthique de la production de connaissances, avérées et volontaires, participant d’une volonté délibérée de tromper, bien évidemment je saisirais l’auteur… a fortiori si celui-ci était un ami puisque cela appelle et aussi permet plus de rigueur… contrairement à cet implicite de sens commun selon lequel l’affection serait faiblesse et coquinerie. L’amitié, en ce qui me concerne, est plus exigeante que l’ordinaire connaissance car elle est inter- et re-connaissance. Reste que, dans ma collection, le respect tatillon des règles de l’académisme universitaire peut contrarier le projet de sensibilisation des lecteurs, être même contre-productif. Un exemple. C’est un ouvrage récent édité par des Presses Universitaires de…. Je ne cite ni son titre, ni son auteur pour ne pas le disqualifier car, par ailleurs, on – enfin, le sociologue ou l’expert capable de traduction – y apprend bien des choses intéressantes. Extrait…

 

 

C’est en page 12, c’est à dire au début d’un ouvrage, le hors d’oeuvre qui doit ouvrir l’appétit pour le plat de résistance. Alors que le titre de l’ouvrage incite nombre d’acteurs politiques, professionnels, militants à l’acquérir, que l’on s’y autorise un extrait, succédant à d’autres, en anglais sans traduction et que l’on assomme le lecteur de renvois qui, de toute évidence, ne seront lus par personne, voilà ce qui me pose vraiment question… Ecrire pour son lecteur nécessite, lorsqu’on publie sa thèse, de ne pas considérer le public comme doté systématiquement d’une HDR… Voilà quelque chose que je peux conseiller en tant que directeur de collection. »

Pierre Dubois. « Très grand merci de votre contribution à cette tempête dans un verre d’eau. Elle est extrêmement claire et argumentée. Elle s’est installée automatiquement en commentaire dans la chronique de mon blog « Histoires d’universités ». Bien évidemment, elle mérite d’être discutée et combattue.

Sociologie de terrain contre sociologie de terrain. Directeur de la licence professionnelle de 2003 à 2008, « Management des organisations de l’économie sociale », avec mon ami Michel Abhervé (n’avez-vous pas écrit un livre avec lui ?), nous avons été amenés à sanctionner des plagiats étudiants http://blog.educpros.fr/pierredubois/2010/11/15/combattre-le-plagiat-etudiant/

Ma question : auriez-vous sanctionné ces étudiants ? A vous lire. Cordialement.

P.L. « Monsieur Dubois bonjour.

Je ne vous connais pas et donc, a priori, vous crédite. D’autant plus que vous travaillez avec Michel Abhervé, un ami et quelqu’un qui, sans être sociologue, a apporté et apporte toujours beaucoup à ce milieu des missions locales que l’un et l’autre labourons depuis des années.

Subséquemment, il ne peut être question de mettre en doute le volet « utilité sociale » de votre travail sociologique et, si je me suis laissé aller à critiquer ce que j’ai malheureusement trop connu avec ma fréquentation des milieux universitaires, je crois avoir indiqué (« … je me suis fait mon opinion – qui souffre quelques exceptions… malheureusement peu – sur la sociologie universitaire… »), que c’est moins pour opposer le terrain à la cité savante que pour tenter de réorienter la boussole universitaire vers le Nord des priorités qui, apparemment, sont les vôtres au regard de votre implication dans la licence professionnelle. Bref, pour tout vous dire, j’ai le sentiment que cette histoire de plagiat – quelques pages dans un ouvrage qui n’a pas de prétention scientifique mais qui se propose d’aider à la lecture et à la compréhension de la sociologie de la complexité – est, d’une part, démesurée et, d’autre part, déséquilibrée vis-à-vis d’autres enjeux sacrément plus vitaux pour l’université.

Vous me posez la question « auriez-vous sanctionné ces étudiants ? » Je réponds que, probablement, avant d’envisager une sanction, j’aurais tenté de comprendre. En particulier, lorsque l’on connaît nombre de pratiques négligentes d’enseignement (cours reportés, annulés, regroupés sur un trimestre pour libérer l’enseignant, confiés à des chargés de cours… répétition ad libitum et ad nauseam des mêmes cours toute une carrière…), on peut imaginer que des étudiants « bricolent » (pas au sens de Levis Strauss malheureusement), « zappent » de wikipedia en commentaire du commentaire du commentaire…  Bref, avant de sanctionner les étudiants pour plagiat, nombre d’enseignants devraient peut-être s’interroger sur l’intérêt qu’ils (ne) parviennent (pas) à insuffler et qui pour partie explique que des étudiants soient tentés d’aller au plus simple, le copier-coller. De mon point de vue, il y a un vrai problème de pédagogie qui est un facteur d’accélération de l’enterrement de la culture de la « Galaxie Gutenberg »… pour une « Galaxie Marconi » dont la première des qualités n’est certes pas la cohérence ou la synthèse.

Vous me poseriez sans doute la question « mais ne doit-on pas être d’autant plus exigeant que c’est un professeur qui est en cause ? » J’y répondrais en deux points.

Le premier, comme je l’ai dit, est que AAA est un sociologue qui « donne le goût » de la sociologie et ce n’est pas rien ; c’est même essentiel. Pour connaître AAA, je ne le crois pas capable de tricher consciemment. Quant à recopier en oubliant des guillemets, certes, il aurait fallu faire attention mais cela me semble bien véniel au regard de ce qui, par contre, me semble primordial : la qualité de la transmission sociologique. Lisant moi-même beaucoup, Michel vous le confirmerait, je dois avouer qu’il m’est arrivé plusieurs fois de m’interroger « mais est-ce bien de moi ceci ? » Ceci étant, j’ai peut-être des problèmes de mémoire et cela ne va pas s’arranger.

Second point – et cela je l’ai compris en lisant Dubar – la question est-elle encore celle du plagiat (a fortiori lorsque le « plagié » dément) ou celle-ci n’est-elle que le prétexte à régler des élections au CNU vis-à-vis desquelles j’ai avoué ma totale ignorance et, en plus, mon absolu désintérêt ? Car, si tel est bien le cas, vous comprendrez que je ne participe pas à un hallali pour un motif qui en cache un autre – e pericoloso sporgesi… – comme derrière AAA se cacherait Maffesoli.

Bien à vous. »

C’est dit.

Cette contribution a été retravaillée à partir de l’article « Esquisse de définition de l’accompagnement social ou, plutôt, socioprofessionnel » publié sur ce blog le 10 novembre 2009 et qui semble avoir rencontré quelque écho puisque, à cette date, c’est l’article qui de très loin a été le plus lu (5 972 fois) et téléchargé. Déposée sur wikipédia (http://fr.wikipedia.org/wiki/Accompagnement_social), diffusée également par le réseau ANDML, cette publication poursuit l’objectif de la construction en concept d’une notion très largement appropriée, à défaut d’être univoque et stabilisée, par les missions locales. C’est dire que ce texte vise à recueillir vos avis, critiques, précisions et compléments avec l’ambition d’une contribution au corpus théorique des missions locales… c’est à dire in fine une pierre à l’édifice de l’évolution des emplois vers celui d’une profession. Merci par avance de faire de telle sorte que ce travail individuel – mais reposant sur des années d’écoute des acteurs – devienne par vos suggestions un travail collectif. Si, bien entendu, vous estimez qu’il en vaut la peine!

Une humanité stable et douce…

S’il appartient à la tradition du travail social et, bien plus en amont, à celle du compagnonnage, l’accompagnement est une notion qui a été très largement appropriée par les acteurs ou « intermédiaires » des politiques de l’emploi, de façon plus générale par les intervenants sociaux : « L’accompagnement est ainsi devenu le mot le plus général pour désigner les pratiques d’un ensemble très large d’intervenants sociaux dans les secteurs les plus divers. » (1) Il existe même depuis 1987, confondant finalité et processus, un… « Mouvement pour l’Accompagnement et l’Insertion Sociale » (soit « MAIS ») qui, d’ailleurs, ne distingue pas dans ses objectifs l’accompagnement social de l’accompagnement professionnel (« … développer la recherche et l’élaboration de projets concernant l’accompagnement social et/ou professionnel de personnes en difficulté d’insertion, vivant ou se préparant à vivre en milieu ordinaire »). Il y aurait sans doute beaucoup à dire de la conception de l’accompagnement telle que présentée par ce MAIS : « L’expérience du travail social montre que l’autonomie commence par la prise de conscience d’avoir besoin d’aide {ce qui signifierait que, si l’on n’a pas besoin d’aide, on n’est pas autonome…}, de savoir gérer ses dépendances {expression étonnante} et accepter les règles, les lois communes, assumer son ou ses handicaps et ses difficultés d’insertion sociale. C’est la capacité de faire face en construisant une réponse adaptée à ses possibilités et ses limites : c’est consentir à soi-même. » Consentir à soi-même : on reste quelque peu désappointé devant cette ambition… (2)

Deux raisons majeures expliquent probablement cette appropriation :

La première est que, dans la mesure où il considère la personne dans sa globalité, l’accompagnement humanise la mise à l’emploi : cum panere, partager le pain, c’est l’expression littérale d’une intimité humaine. Isabelle Astier parle d’ « une activation douce » (3)… Pour Mireille Berbesson et Binh Dô-Coulot, « L’adoption généralisée de ce terme d’accompagnement a permis à bon compte de « moderniser » l’intervention : on « n’aide » plus, on « n’assiste » surtout pas, on « suit » de moins en moins, on « accompagne ». Et comme on intervient dans le champ social, on fait donc de « l’accompagnement social ». » (4)

La seconde raison tient à la mutation du marché de l’emploi, à sa flexibilité, qui appelle une « sécurité sociale professionnelle », l’accompagnement représentant en quelque sorte en contrepoint la garantie de stabilité et de continuité dans l’instabilité et la discontinuité : « Vivre dans l’immédiateté les mouvements de fond qui changent la société renforce le sentiment de la fin des stabilités et la nécessité, pour la collectivité, de penser l’avenir davantage en termes de développement qu’en termes de protection et de reproduction, pour les individus, d’apprendre à gérer leurs trajectoires de vie dans et malgré les incertitudes et, donc, à développer leurs capacités propres d’innovation. » (5) A bien y réfléchir, on n’est guère éloigné de ce « point fixe » que Robert Musil recherchait en plantant un clou dans un jet d’eau (L’homme sans qualité).

Point essentiel, l’accompagnement n’est pas qu’une modalité du travail ou de l’intervention sociale mais il est devenu – pour les jeunes et avec l’article 13 de la loi de cohésion sociale – un nouveau droit – créance voulu par le législateur : « Toute personne de seize à vingt-cinq ans révolus en difficulté et confrontée à un risque d’exclusion professionnelle a droit à un accompagnement, organisé par l’Etat, ayant pour but l’accès à la vie professionnelle. » Plutôt qu’au compagnon, l’accompagnement renvoie ici à l’accompagnateur : quelqu’un qui guide et qui soutient, qui aide à franchir des obstacles et indique le chemin : « Dans tous les rapports sociaux, il est un stade où quelqu’un nous prend par la main et nous guide. » (6)

L’expression assez commune d’« accompagnement social » demeure cependant ambiguë car elle signifie généralement un accompagnement dans tous les champs de l’activité humaine, excepté celui du professionnel : habitat, mobilité, culture, santé, etc. Cependant, dès lors que l’accompagnement social soustrairait  le champ professionnel, force serait de constater qu’il ne serait plus global. De la sorte, l’accompagnement social ne peut être, déjà textuellement, global ; il peut par contre, s’il s’inscrit dans une conception professionnelle et sociale, être une sous-partie d’un accompagnement global. Cet accompagnement social « raccroché » à l’insertion professionnelle peut aussi être, il faut en être conscient, une sorte d’illusion ou d’alibi comme une cerise sur le gâteau, lui en dur,  du professionnel : ainsi « l’appui social individualisé (ASI), une mesure qui permet que les demandeurs d’emploi soient, le cas échéant, orientés vers des soins psychologiques tant leur mal-être paraît compromettre leur reprise d’emploi, n’a acquis une certaine légitimité qu’accrochée au train de la recherche d’emploi et prescrite par l’ANPE. Comme si même à l’égard des personnes les plus éloignées de l’emploi, il fallait continuer à faire semblant coûte que coûte de se fixer l’objectif de l’emploi « normal ». » (7) Autrement dit, le social serait l’excipient doux, le suave additif d’une dragée amère… du moins dure à se casser les dents sur l’indicateur d’« accès à l’emploi durable ».

Questions à la globalité.

Il nous faut à ce stade nous mettre d’accord sur ce qu’est cette globalité… affirmée pour les missions locales dès la Charte de 1990 (« … une intervention globale au service des jeunes… ») et jusqu’au Protocole 2010 (« … organiser localement une intervention globale au service des jeunes, de 16 à 25 ans révolus, en quête d’un emploi durable et d’une autonomie sociale. »). Cette même globalité se lit dans les documents de référence d’autres réseaux tels l’UNHAJ (8), les centres sociaux (9) ou les Ecoles de la Deuxième Chance (10).

Première observation, qui n’est ni nouvelle, ni de détail, on parle fréquemment de « jeunes en difficulté »… expression à bannir pour la remplacer en immisçant trois lettres, trois petites lettres qui font la différence : « m », « i », « s »… c’est à dire non pas « en difficulté » mais « mis en difficulté » (11). En effet, la difficulté ne réside pas dans la jeunesse comme un cancer qu’il faudrait chirurgicalement extirper à coups de projet et d’accompagnement, mais elle est au cœur de la « logique » (on peut hésiter à user de ce mot) de la société, particulièrement la « logique  économique » (on peut hésiter encore plus). Très simplement, souvenons-nous du petit sursaut de croissance à la fin du précédent millénaire : nombre de jeunes considérés comme « inemployables » ont parfaitement su trouver le chemin de l’entreprise. En d’autres termes, le premier facteur de désinsertion est bien le marché, son hypersélectivité et la règle énoncée il y a plus d’un siècle par un barbu : « l’armée de réserve » des travailleurs sans emploi n’est pas obsolète.

Seconde observation, même si le social est présent et ne serait-ce que parce que les missions locales sont évaluées sur leur réussite quant à l’accès à l’emploi et à la formation qualifiante de leurs publics, le domaine professionnel est considéré – est-ce assumé ? – comme étant « plus important » que le social. Nombreux sont ceux qui s’arc-boutent sur l’obligation éthique de ne pas hiérarchiser professionnel et social, Pascal leur étant d’une aide précieuse en écrivant dans les Pensées : « Toutes choses étant causées et causantes, aidées et aidantes, médiates et immédiates, et toutes s’entretenant par un lien naturel et insensible qui lie les plus éloignées et les plus différentes, je tiens pour impossible de connaître les parties sans connaître le tout, non plus que de connaître le tout sans connaître particulièrement les parties… » Intellectuellement, une évidente simplicité s’impose : on ne peut découper l’individu, le saucissonner, sauf à l’amputer : l’intervention sociale ne peut être considéré comme une œuvre de boucher. Ainsi le précepte cartésien de séparabilité (« diviser chacune des difficultés … en autant de parcelles qu’il se pourrait et qu’il serait requis pour mieux les résoudre ») qui appartient au monde de la complication alors que, de toute évidence, le social est dans celui de la complexité, arrive à point nommé.

A l’inverse pourtant, d’Adam Smith avec sa manufacture d’épingles au sein de laquelle les tâches avaient été parcellisées à Durkheim avec ce passage des communautés « mécaniques » aux collectivités « organiques », on peut dire que la modernité se construit tendanciellement et nécessairement sur une division sociale du travail, « une culture de la séparation » pour Alain Touraine (12). Et, s’agissant des intervenants sociaux qui agissent dans le champ de l’insertion, force est de constater que la polyvalence est susceptible de les faire basculer du « bon à tout » au « bon à rien »… ou que savoir tout sur tout n’est guère éloigné de savoir rien sur tout ou tout sur rien. Ce qui conduit, tout en maintenant le principe de l’approche globale, à développer au sein des structures des « expertises », des spécialisations, et à « organiser l’organisation » pour que circulent les connaissances issues de ces expertises… bref que l’on parvienne à l’organisation intelligente, apprenante, à l’intelligence partagée et non distribuée entre savants et ignorants bien stratifiés, alpha + et bêta -.

Que coexistent au sein des structures des expertises ou, du moins, des spécialisations est un fait : untel intervient sur les savoirs de base, tel autre sur le volet culturel, celui-ci pour le parrainage et celui-là pour la relation aux entreprises, etc. ceci ne remettant pas en cause la globalité puisque tous les registres ou presque ont en quelque sorte leurs réponses dans la même structure en termes – comme on dit désormais – d’« offres de services » adaptées aux besoins par définition singuliers de chaque usager. Pour une mission locale, cette globalité et la posture qu’elle exige apparaissent donc comme effectives… même si les poids respectifs occupés par le social et le professionnel ne sont pas équilibrés : les compétences en action s’exercent dans les deux registres mais l’expertise – qui est une « compétence + » – est affirmée dans le registre professionnel. Dans le champ de l’insertion, le professionnel – qui inclut la formation et l’emploi – est donc un domaine saillant de l’approche globale qui, elle, constitue le socle. L’un et l’autre ne s’opposent pas – contrairement à ce qu’écrit Chantal Guérin-Plantin qui parle de « coupure » entre l’économique et le social (13) – mais se complètent dans une interaction, peut-être une « dialogique » – la transaction entre deux propositions opposées et complémentaires – comme l’exprimerait Edgar Morin.

Probablement pourrait-on également dire que cette acceptation d’une expertise pour le domaine professionnel et d’une compétence pour le domaine social – ce qui équivaut à une hiérarchisation tout en maintenant l’indissociabilité – est la résultante ou la synthèse d’une dialectique entre l’identité de la mission locale et la-les logique-s institutionnelle-s : l’emploi pour l’Etat, la formation pour la Région, le social pour le Département. Bien sûr, si l’on accepte ce déséquilibre au bénéfice de l’expertise professionnelle, voulue par les institutions, tout en se réclamant de l’approche globale, il faut être constamment vigilant – c’est une des fonctions majeures du projet associatif de structure – et, pour cela, avoir en mémoire, afficher même cet avertissement de Bertrand Schwartz : « Ainsi considérons-nous comme grave et dangereux le risque qu’on encourrait à ne prendre en considération que les mesures touchant à la formation et à l’emploi parce qu’elles apparaîtraient suffisantes pour régler les problèmes les plus visibles. » (14)

Au regard de ce principe-pivot d’approche globale ou « holistique » ou encore plus pertinemment « systémique », c’est-à-dire d’indissociabilité des domaines, la conception de l’accompagnement social correspond ici à ce que l’on devrait sans doute nommer plus justement l’accompagnement socioprofessionnel (ASP).

Prendre en compte…

L’ASP porte sur l’individu (individuum : « ce qui ne se sépare pas ») ou sur la personne dans sa globalité (15) s’appuie sur le principe de ses ressources (une « pédagogie de la réussite », disait-on), vise à réduire ou à résoudre les difficultés de tous types qui font obstacle à l’intégration, cette dernière entendue comme finalité du processus d’insertion professionnelle et sociale (16), et mobilise les professionnels qui interviennent en « prenant en compte » et non « en charge ». Cette expression, « prendre en compte, non en charge », est de Bertrand Schwartz. Heureuse et même séduisante, elle mérite néanmoins qu’on s’y arrête quelque peu.

La « prise en charge » renvoie implicitement aux modalités du travail social traditionnel, la « prise en compte » signifiant une autre modalité qui serait celle de l’intervention sociale. On serait donc dans un système d’oppositions, ce que Michel Autès accentue (rudement) dans Les paradoxes du travail social : « On assiste, du travail social à l’intervention sociale, à un étrange passage, d’autant plus tumultueux que la fascination du nouveau cache non seulement des permanences invisibles et plus encore des régressions formidables, vers des formes de traitement de la question sociale antérieures à celles que l’Etat social avait laborieusement mises en place. Ainsi, sous couvert de la dépasser, l’insertion vient prendre a place de l’assistance, au nom des valeurs de la société du travail, et la logique de développement social cultive son échec en reniant sa généalogie avec le travail social forgé au sein de l’Etat social. En deçà de ces luttes pour occuper les positions légitimes dans le champ, on assiste bien à la confrontation de deux stratégies politiques pour traiter la question sociale. D’un côté, celle de l’Etat social, protectrice, réparatrice et assistantielle, de l’autre, celle de l’Etat libéral, qui cherche à rompre avec l’assistance, au nom de la responsabilisation de l’individu, mais surtout pour satisfaire aux impératifs de la compétitivité économique. Mais, faute de garder liés ensemble le programme protecteur de l’assistance républicaine et le projet d’émancipation individuelle et collective, inscrits dans l’action sociale, l’insertion prépare en douceur, j’allais dire en douce, le programme de l’idéologie du workfare : pas d’allocation ni de secours sans contrepartie. » (17) Il serait assez facile – mais là n’est pas l’objet de ce travail – d’objecter à cette analyse, par exemple en rappelant que le travail social, ici paré des vertus de la protection et de l’égalité alors que l’intervention sociale est présentée comme le Cheval de Troie du workfare et, pire, du (néo)libéralisme, fut en son temps largement critiqué comme outil du contrôle social par des Deleuze (« milieux d’enfermement »), Foucault (« sociétés disciplinaires »), etc. C’est de toute façon mal connaître le paradigme de l’éducation permanente, auparavant « populaire », mais également les luttes urbaines (Alma Gare…-18), que d’inscrire l’intervention sociale qui en est issue dans la dynamique aussi subversive que dissimulée du néolibéralisme. (19) L’autre hypothèse serait que les intervenants sociaux sont soit naïfs, soit imbéciles en ne comprenant pas que le projet, le contrat avec l’usager, etc. ne seraient qu’une rhétorique grimant un processus d’oppression-aliénation et camouflant, pour parler comme Pierre Bourdieu, « une violence symbolique »… d’autant plus oppressive que, à défaut d’être le thuriféraire attitré de celui-ci et abonné de la première heure aux Actes de la recherche en sciences sociales, on ne saurait la décrypter et y résister. (20) Or le contrat, loin d’être un outil d’oppression (parce que le rapport entre le conseiller et l’usager est inégalitaire et que le premier en maîtriserait mieux que le second les subtilités), est une modalité souple d’interconnaissance et d’inter-reconnaissance ; il explicite les règles du jeu entre le professionnel et l’usager mais également entre les professionnels dans ce que l’on appelle le partenariat et qui est la mobilisation d’un capital social, de liens faibles : « La démarche contractuelle dans l’action publique contemporaine est porteuse d’une double ambition de modernisation. L’une est organisationnelle : contractualiser entre plusieurs parties prenantes, c’est mieux se coordonner, favoriser une approche transversale des problèmes, agir globalement. L’autre est plus directement politique : l’intention est de favoriser par le biais du contrat les démarches montant du terrain, les solutions différenciées et l’implication directe locale. » (21) Sans le contrat, de l’inégalité objective de la relation « conseiller – jeune », inévitablement ressortirait gagnant le plus fort ou le plus retors. Le contrat aplanit et civilise la relation inégalitaire.(22)

Reste cependant que cette opposition entre « prendre en charge » et « prendre en compte » peut aussi recouvrir ce que Jean-Noël Chopart appelle « un vieil antagonisme entre travail social individuel et travail social « avec les groupes » ou travail social communautaire. {…} D’un côté un univers rationnel-légal, essentiellement procédural, hérité d’une logique d’intervention verticale définissant des populations cibles, des ayants droit, des seuils et des conditions d’accès, avec des agents chargés de distribuer des prestations fixées à l’avance et d’en vérifier le bien-fondé. De l’autre, une intervention globalisée, peu prescrite, fondée sur un idéal de démocratie participative, et donc construite sur une logique de coproduction avec l’usager. » Tout à fait concrètement, une différence qui est loin d’être anodine entre le travailleur social, par exemple l’éducateur puisqu’il s’agit de jeunes, et l’intervenant social, en mission locale, est la permanence du professionnel auprès de son usager : en mission locale, c’est environ 30% des jeunes qui bénéficient de quatre entretiens ou plus dans l’année, soit quelques heures d’entretien… à comparer aux heures passées avec les jeunes par un éducateur de prévention spécialisée ou, encore plus, par un éducateur en foyer de l’enfance ! L’intervenant accompagne le jeune et son projet, l’éducateur éduque et, peu ou prou, est un modèle d’identification, parfois même un substitut parental. En tout état de cause, même s’il le voulait, le conseiller de mission locale avec 150 ou 200 « dossiers actifs » ne pourrait prendre en charge et, sauf exception, n’a guère à se soucier de transfert et de contre-transfert.

La posture professionnelle se fonde en conséquence sur l’aide au développement de l’autonomie sociale et de l’indépendance économique de la personne et n’est pas, ne peut ni ne doit être une démarche hétéronome. Dans le rapport de 1981, Bertrand Schwartz écrit à ce propos : « Nous nous sommes interdit d’interpréter le terme d’insertion comme pression que les adultes exerceraient sur les jeunes pour les conformer à des normes prédéterminées, tant dans le champ professionnel que dans tous les champs de la vie sociale quotidienne. » (23) Bien évidemment, cette « auto-interdiction » est un principe de vigilance car on sait que le champ de l’insertion est aussi, a minima du fait des contingences et pressions institutionnelles, le monde des « entrepreneurs de morale » (24)

Sur le volet professionnel, l’accompagnement répond à « la nécessité de promouvoir une sécurisation des trajectoires passant par la prévention de la dégradation des compétences, l’amélioration des mobilités et le développement de l’employabilité. » (25) Finalisé par l’accès à l’emploi et le maintien dans celui-ci de la personne (26), souvent en étayage d’une logique d’alternance, « l’idéal » de l’accompagnement repose sur une synthèse (serait-ce une utopie ?) issue d’une négociation entre projets de vie et professionnel (« L’adolescent à travers le projet cherche à explorer de nouveaux rapports entre le possible et le réel. » (27), ressources individuelles et opportunités du marché du travail, normes prescrites et pratiques plus ou moins choisies. Cette synthèse négociée est formalisée dans un contrat qui peut lui-même s’inscrire dans un dispositif ou une mesure (le CIVIS) énonçant un certain nombre de conditions (modalités) à satisfaire.

Avec toutes les réserves d’un schéma linéaire alors que le processus d’ASP est fait d’itérativité, de progressions et de régressions, on peut représenter l’enchaînement de ses séquences…

Accueil, écoute Diagnostic partagé Projet et scenarii Contrat Mise en œuvre Suivi
Posture compréhensive, empathique. Forces et faiblesses internes et externes… Capitaux à renforcer… Mise en évidence des potentialités du jeune et des opportunités de l’environnement. Synthèse projets de vie /professionnel. 

Explicitation des objectifs possibles et hiérarchisés. « Esquisse d’un compromis entre le possible et le souhaitable. » (28)

Négociation du cadre normatif contractuel : engagement, réciprocité. Modalités de la stratégie. Evaluation chemin faisant, analyse des écarts, adaptabilité du projet…

L’ASP ainsi formalisé, peut-être même institutionnalisé, renvoie aux difficultés que rencontrent les demandeurs d’emploi pour accéder à l’emploi, pour intégrer un marché du travail dont les codes semblent de plus en plus difficiles à décrypter. Son rôle paraît d’autant plus nécessaire que d’importants changements dans les modes de recrutement et dans les organisations du travail sont attendus dans les années à venir. (29) De fait, il introduit une nouvelle dimension dans le rapport au marché du travail : une sorte d’espace alternatif (pour les jeunes, de socialisation ?) dans lequel les conseillers en charge de l’accompagnement combinent des procédures, des outils, des prestations et doivent bricoler, faire preuve d’innovation (30) et aussi, bien souvent… d’abnégation face à des stop and go, face à une gestion des aides à l’enveloppe, etc. Quant aux demandeurs d’emploi, ils doivent trouver dans cet espace les moyens de créer des liens avec le marché de l’emploi et, en cela, prendre conscience de leurs capacités et potentialités (empowerment), acquérir les codes du dialogue employeur – employé, au besoin définir un projet et/ou suivre une formation, etc., pour, à terme, être autonome dans le monde du travail. Ainsi les mesures d’accompagnement, qui sous-entendent un contrat – selon les cas – formel ou informel passé entre le demandeur d’emploi et le conseiller, sont supposées inscrire les individus concernés dans une dynamique d’échange et de recherche.

Un paradoxe se pose alors : ces mesures permettent-elles effectivement aux individus d’atteindre à une réelle autonomie ou induisent-elles au final un besoin plus fort d’accompagnement ? (31) Le demandeur d’emploi est en recherche d’emploi et l’accompagnement doit l’étayer pour les situations poursuivies d’entretien. Le risque de cette dernière hypothèse est d’autant plus fort que, dans nombre de cas et ceci étant accentué par la crise, les professionnels en principe mobilisés pour gérer du flux sont, faute de débouchés, contraints à une gestion de stock. Ils sont, selon la métaphore de Robert Castel, comme « un passeur qui s’apercevrait en cours de traversée qu’il n’y a plus de berge où conduire son passager. » (32) Plutôt que de développer une « handicapologie » comme cela a été avancé par Denis Castra (33), la tentation peut être forte,  ce moment, de se focaliser plutôt sur l’accompagnement que sur le résultat de celui-ci : un accompagnement ad vitam, ad libitum, ad nauseam… pour le jeune mais également pour le conseiller !

Le conseiller, un convoyeur de fonds…

Que l’ASP soit global ne signifie pas qu’il est réalisé par un seul professionnel, le « référent », qui apporterait toutes les réponses. Le référent est le « fil rouge » de l’accompagnement, le « marginal sécant » qui évolue dans et entre toutes les sphères de l’insertion, garant d’une continuité de l’action, d’une cohérence de celle-ci. Le référent est, à l’échelle de la relation avec le jeune demandeur d’emploi, ce que devrait être (devait être ?) à l’échelle d’un territoire une maison de l’emploi : un guichet unique. Le référent est une dynamo, un mobilisateur du réseau partenarial (ressources internes et externes des politiques de l’emploi et des politiques sociales) ainsi que du réseau d’entreprises et de structures spécialisées. Marginal sécant qui ne boîte ni sur le pied du social, ni sur celui de l’économique mais marche sur ses-ces deux pieds (34), il est un convoyeur de fonds. Si l’on veut bien admettre que les jeunes en mission locale présentent généralement – au regard des normes dominantes et des exigences sociétales pour s’intégrer – un déficit dans un ou plusieurs types de capitaux, le conseiller peut alors être considéré comme celui qui, directement mais le plus souvent indirectement, c’est à dire par son entregent, va compenser ces déficits. Ainsi, le conseiller mobilise du…

– Capital économique, avec des allocations, des secours, des aides « interstitielles » ou non, du micro-crédit, la résolution de problèmes de surendettement… et, surtout, par l’accès à l’emploi qui permettra à la personne de percevoir un revenu.

– Capital culturel, avec le recours à des formations, à des validations de parcours, au portefeuille de compétences, etc.

– Capital social, pour le volet professionnel via l’accès aux entreprises ou aux intervenants spécialisés, via l’utilisation des mesures de la politique de l’emploi (prestations Pôle emploi, dispositifs spécifiques des collectivités territoriales, aide à la mobilité…), voire même par l’innovation et la conception de nouveaux outils (jeunes créateurs d’entreprise, groupements d’employeurs, groupements d’employeurs pour l’insertion et la qualification, structures d’insertion par l’activité économique…) ; pour le volet social, via l’accès aux ressources (acteurs, dispositifs, droits…) des domaines de la culture, de la santé, du logement, des transports, etc.

– Capital symbolique par la remise en confiance de la personne (ateliers « image de soi », « relooking », projet individualisé et, de façon plus générale, les règles de l’entretien d’aide…).

On pourrait ajouter à ces quatre capitaux traditionnels, le capital de mobilité, c’est à dire la capacité voire même la curiosité de se déplacer tant la mobilité, qui fût déterminante en termes de perfectionnement dans la tradition compagnonnique (35), l’est désormais bien plus modestement en termes de simple employabilité… sauf à rester « petit » et « fixe » : « … la mobilité, la capacité à se déplacer de façon autonome, non seulement dans l’espace géographique mais aussi entre les personnes ou encore dans des espaces mentaux, entre des idées, est une qualité essentielle des grands, en sorte que les petits s’y trouvent caractérisés d’abord par leur fixité (leur rigidité). » (36) Bien sûr, cette mobilité doit être comprise intelligemment, c’est à dire non dissociée de la stabilité : on est mobile pour gagner en stabilité, pas pour s’épuiser sur la piste de « On achève bien les chevaux ». (37)

Les six invariants de l’ASP.

Selon les professionnels, les structures (moyens et management), les métiers, les structures d’appartenance, les contextes ainsi que les « exigences de société » (financeurs, dispositifs réglementaires et juridico-administratifs), l’ASP revêt des formes variées, plus ou moins formalisées, voire parfois standardisées. Toutefois l’accompagnement associe de façon quasi-systématique six éléments agencés avec l’usager… ce « avec » signifiant que le travail est négocié : « C’est probablement là ce qui distingue fondamentalement la socialisation primaire, celle qui vise la « cire molle » de l’enfance, de la socialisation secondaire, celle qui vise des acteurs disposant d’un certain pouvoir. » (38)

– Le référent unique. Il est une garantie de stabilité et aussi d’approfondissement de la relation, donc de progressivité dans la démarche de projet, ce que ne permettrait pas une interchangeabilité des conseillers.

– Le projet. Contrairement au thème du « diktat » (la vraie dictature étant celle de la vacuité du projet), le projet est ce qui apporte une cohérence dans le parcours en reliant les trois temporalités du passé, du présent et du futur. Il met en perspective et oriente. Sans doute ce qu’écrit François Dubet pour les travailleurs sociaux est-il encore plus patent pour les intervenants sociaux : « … les travailleurs sociaux sont aussi des prestataires de services sociaux et de dispositifs visant à donner aux individus une place dans la société ou dans des structures intermédiaires. Le langage de la morale et du contrôle est ici remplacé par celui du contrat et du projet. » (39)

Le projet étant souvent au départ à court terme et tactique, le travail d’accompagnement vise un ou des sauts qualitatifs pour qu’il parvienne à être à plus long terme et stratégique, voire « de vie ». On peut, en combinant les travaux de Dubet, de Boutinet, de Rodriguez-Tome et Bariaud, présenter une typologie des projets dont il découle un travail de progression pour que le jeune, parfois au départ « hors projet » ou « sans projet », parvienne à un « projet de vie » (40):

Hors projet Sans projet Avec projet
(J.-P. Boutinet) 

Irréalité

(J.-P. Boutinet) 

Vacuité

« Ca sert à rien… »

De mobilité à court terme (F. Dubet) 

D’orientation (J.-P. Boutinet)

D’insertion à moyen terme (J.-P. Boutinet) Adulte à long terme (F. Dubet) 

Vocationnel  (J.-P. Boutinet)

De vie (H. Rodriguez-Tome, F. Bariaud

– L’entretien. L’entretien est la modalité principale mais non exclusive de l’ASP. Il permet l’individualisation de l’offre de service et articule successivement l’écoute bienveillante (posture « compréhensive »), la coproduction d’une analyse des forces et faiblesses, menaces et opportunités, aspirations et contingences, etc. et la codécision des démarches à engager (ex ante), leurs modalités ainsi que l’évaluation des acquis (in itinere, ex post).

– Le contrat. Même « humain » ou « doux », l’ASP ne s’inscrit pas dans un registre du don et contre-don mais il « requiert et engage des dispositions personnelles à la négociation et, plus spécialement, à la traduction entre des mondes de références différents. C’est, dans une large mesure, un savoir-faire de passeur impliqué. » (41) Le contrat nécessite que le jeune soit reconnu comme partie contractante, donc actif : il n’est pas, pour reprendre Montaigne, « le vase qu’on remplit » mais « le feu qu’on allume » ; en d’autres termes, à la base du contrat, il y a le jeune comme ressource, non comme problème. Cette expression de « jeune comme ressource », outre qu’elle renvoie à un principe essentiel de l’éducation populaire (42), signifie, d’une part, que le regard du professionnel sur le jeune s’oriente délibérément vers les potentialités (« L’homme est plein à chaque minute de possibilités non réalisées. » – 43), les freins et obstacles n’étant étudiés qu’après – c’est donc une question de posture – et, d’autre part, que c’est in fine le jeune qui mettra en œuvre, dans les conditions qu’il choisira, son projet d’insertion : « L’important n’est pas ce qu’on fait de l’homme mais ce qu’il fait de ce qu’on a fait de lui. » (44).

Mireille Berbesson et Binh Dô-Coulot proposent une typologie avec trois classes d’engagement : « l’engagement réciproque simple » où l’on serait, selon nous, plus sur le volet de l’accueil et du coup de main ou du dépannage que de l’accompagnement proprement dit (« C’est souvent une posture adoptée dans les accueils de jour, et qui ressort plus de la qualité de présence… que d’un accompagnement, à proprement parler. » (45); « l’engagement réciproque comportant une aide financière » et « l’engagement formalisé par un contrat signé ». Cependant on ne voit pas très bien ce qui justifie cette distinction entre la deuxième classe (avec l’aide financière) et la troisième (avec contrat) : dans un cas comme dans l’autre, il y a un principe de conditionnalité, la caractéristique financière de l’aide (telle qu’on l’a connue avec la bourse d’accès à l’emploi ou qu’on la connaît avec l’allocation CIVIS) pouvant parfaitement être présente, sinon l’étant systématiquement, dans l’engagement avec contrat.

Isabelle Astier préfère à la notion de contrat celle de pacte, que nous attribuerions plus volontiers – hormis Faust ! – à une dimension plus collective qu’individuelle (« Pacte territorial pour l’emploi des jeunes », voir en remontant à la préhistoire de l’insertion, les « Pactes pour l’emploi » de R. Barre). Pour cette auteure, le pacte repose sur quatre éléments : « une situation en panne avec laquelle les acteurs vont devoir composer ; une interaction qui s’organise sur le mode d’une coordination {mais n’est-ce pas cela le contrat ?} ; l’improvisation d’une orientation morale et pratique limitée à la situation {pourquoi l’orientation morale serait-elle improvisée et limitée à la situation ?}; et, enfin, le fait que les méthodes employées sont modulables, révisables et supposent un travail d’accommodation. {mais n’est-ce pas cela le projet ?} » (46) Par contre, Isabelle Astier avance, plutôt que l’intégration, le concept d’intégrabilité qui pourrait être adopté nonobstant la difficulté de son appropriation par le réseau : « Penser en termes d’intégrabilité implique une démarche volontaire, une demande d’adhésion explicite de la part des individus. » et, citant Marc-Henry Soulet, définit l’intégrabilité comme « la capacité à prendre socialement place en tant que sujet constitué et responsable. » (47)

– Les apports instrumentaux. Ce sont, par exemple, les « ateliers » de type « TRE » (techniques de recherche d’emploi), « CV », etc. Collectifs ou individuels (« libre service), ces apports ont dans la démarche d’accompagnement un avantage : ils font intervenir à côté du Sujet individuel l’Acteur collectif, rompant le cercle qui peut être trop clos voire psychologisant de la relation duelle « jeune – conseiller/référent » où peuvent se jouer des phénomènes de captation (transfert) et, subséquemment, le glissement du « prendre en compte » au « prendre en charge ».

– La mobilisation des liens faibles. Enfin, l’accompagnement socioprofessionnel ne se limite pas au face-à-face, ni à l’animation d’une situation collective mais recouvre une ingénierie de réseau, c’est à dire des possibilités construites, suscitées, et des modalités de mobilisation des ressources de l’environnement, ce qui est habituellement identifié comme « le partenariat » (48). Celui-ci s’impose en principe dans tous les domaines où, précisément, la structure ne dispose pas de suffisamment d’expertises et, lorsque les parties ont grosso modo le même métier, le partenariat cède pour partie la place à la co-traitance (missions locales et Pôle emploi). Ce partenariat correspond en fait à la multiplication et démultiplication des « liens faibles ». Ainsi la caractéristique professionnelle de l’ASP appelle que, dans ce champ, cette ingénierie ne se limite pas à l’organisation du circuit de réception et de traitement des offres de Pôle emploi mais, visant le « marché caché » qui recense plus de la moitié des offres, s’appuie sur un système de veille partagé allant d’une connaissance actualisée des ressources du territoire (« l’observation active » dans l’offre de services n° 4 des missions locales, le diagnostic socioéconomique glissant…) à un système intégré d’animation de ce réseau, à la prospection pour le renouveler, etc.

Chacun de ces éléments constitutifs de l’ASP est lui-même construit à partir de plusieurs variables : l’entretien, par exemple, s’appuie ou non sur un outil (logiciel Parcours en mission locale, guide…), se déroule à une fréquence déterminée ou indéterminée, rapprochée ou non (49) , s’inscrit dans une logique de rendez-vous ou est immédiat (« sur flux ») en fonction de la pression de la file active…

Une personne et quatre personnages dans quatre sphères pour quatre finalités…

Socioprofessionnel, qu’il soit ou non « renforcé », mais subséquemment avec une plasticité et une graduation de l’intensité de l’offre de service, l’accompagnement s’exerce dans quatre sphères interdépendantes, poreuses. Dans chacune d’entre elles, la personne poursuit une finalité particulière, l’accompagnement visant à l’aider à atteindre celle(s)-ci, l’une, plusieurs ou toutes selon les besoins et aspirations. Quatre « personnages », qui constituent la personne (50), cohabitent dans ces quatre sphères – le Sujet, l’Acteur, le Citoyen et le Producteur (51) – et la finalité générale ou ultime est l’intégration reposant sur l’indépendance économique et l’autonomie sociale. Cette intégration appelle plusieurs registres ou « logiques d’action », pour reprendre les termes de François Dubet : une logique d’intégration dans la communauté humaine, une logique stratégique dans l’espace de concurrence du marché et une logique de subjectivation dans le registre de l’historicité « issue de la tension entre une conception de la créativité et de la justice d’une part et des rapports de domination d’autre part. » (52)

Sphères

Dimensions Idéaux-types Finalités particulières Champs Finalité 

générale

Logiques d’action
Economique micro/méso/macro Producteur Autosubsistance Indépendance  

Intégration

 

Stratégie
Individuation micro Sujet Accomplissement  

Autonomie

Intégration
Sociabilité méso Acteur Lien/Altérité
Sociétal macro Citoyen Emancipation Subjectivation

Le Sujet évolue dans le monde de l’intime, dimension micro, qu’on appelle l’individuation (53). Il y est question de sa santé, de son équilibre psychologique, de ses relations avec ses proches, de son logement. Le Sujet aspire à l’accomplissement… qui n’est pas nécessairement l’atteinte d’une cime. Il peut être la congruence : ne pas boiter, marcher sur ses deux pieds, être en cohérence pensées/pratiques, aspirations/réalisations… L’objet privilégié de l’accompagnement est ici l’acquisition par le jeune d’une confiance en lui-même (le « capital symbolique ») et la résolution des problèmes sociaux, à tort souvent caractérisés de « périphériques », qui, s’ils persistaient, obèreraient une intégration durable : disposer d’un toit, avoir accès aux soins…

L’Acteur navigue dans l’archipel des relations, dimension méso, qu’on appelle la sociabilité (54). L’acteur est un être social et communiquant ; il rencontre les autres, se lie d’amitiés mais aussi de sympathies brèves ; il participe, fait avec les autres et s’associe ; il investit son quartier, constitue le voisinage ; il reconnaît, est reconnu. L’Acteur aspire à l’altérité. L’accompagnement, ici, élargit le réseau du jeune, multiplie les « liens faibles ». (55)

Le Citoyen regarde haut et loin jusqu’à la société ; il retrousse ses manches et plonge ses mains dans les enchevêtrements institutionnels et politiques, dimension macro, qu’on appelle le sociétal (56). N’opposant pas les éthiques de conviction et de responsabilité, le Citoyen est convaincu et se veut responsable ; il veut jouir de ses droits ; il respecte aussi ses devoirs… du moins en théorie ; il constate que la société ne fonctionne pas comme elle le devrait et il agit pour la changer. Le Citoyen aspire à l’émancipation.

Le Producteur gagne son pain en travaillant mais, comme l’exercice du travail ne se résume pas à un lieu de production, il s’affirme dans un espace de socialisation fait de codes, de signes de reconnaissance, d’appartenance et de distinction, dimensions micro – méso – macro, qu’on appelle l’économique. Le Producteur aspire prioritairement – mais cela ne s’y limite pas – à l’autosubsistance. Il aspire également à la reconnaissance de son utilité dans le travail, à ce que nous avons appelé la « professionnalité » et qui est une des trois composantes de la professionnalisation avec la « profession » et le « professionnalisme ».

Dans la sphère de l’économique, l’objectif est l’indépendance financière via l’accession à l’emploi (57) et le revenu qui lui est attaché. Mais cet objectif est lui-même insuffisant et il doit s’accompagner d’une capacité de la personne à gérer des discontinuités, sinon systématiques du moins prévisibles particulièrement pour des emplois de bas niveau de qualification. Quant à l’ASP, il n’est plus seulement vers mais dans l’emploi. Ce saut qualitatif du « vers » à « dans » l’emploi modifie substantiellement les pratiques d’accompagnement et les représentations des conseillers de leurs métiers (deux « clients » au lieu d’un seul, le demandeur d’emploi et l’entreprise), contraignant théoriquement une partie de ces derniers à une acculturation au regard de leurs postures vis-à-vis des entreprises et de l’économie marchande. Des solutions organisationnelles, variables selon les structures, peuvent exiger cette acculturation ou, au contraire, l’éviter par exemple en opérant une division du travail (« chargés de relations entreprises », équipe emploi dédiée voire mutualisée avec Pôle emploi, une Maison de l’Emploi, un PLIE…). Cependant – et cela constitue un point de vigilance – l’évolution « dans » l’emploi contraint à repositionner les intermédiaires de l’emploi dans une dimension qu’ils n’auraient jamais dû sous-estimer : l’efficacité de la politique de l’emploi est déterminée par son articulation avec les stratégies micro-économiques des entreprises et des territoires, ce qu’en théorie les SPEL doivent travailler. Mais, par définition, un SPEL (ne) s’occupe (que) d’emploi. Il semble donc nécessaire, au regard de ce principe d’approche systémique, que les missions locales soient à l’initiative et en pilotage – avec le niveau correspondant de collectivité territoriale – d’une politique locale d’insertion.

Notes

(1) F. Mégevand, « L’accompagnement, nouveau paradigme de l’intervention publique », (sous la dir.) R. Ballain, D. Glasman, R. Raymond, Entre protection et compassion. Des politiques publiques travaillées par la question sociale. 1980-2005, 2005, Grenoble, PUG.

(2) http://mais.asso.fr/annonce.php

(3) I. Astier, Les nouvelles règles du social, 2007, PUF, p. 9.

(4) « L’accompagnement social dans les politiques d’insertion et de lutte contre les exclusions », 3 décembre 2003, DGAS, Sous-direction des politiques d’insertion et de lutte contre les exclusions, p. 3.

(5) D. Charvet, Jeunesse, le devoir d’avenir, Commissariat Général du Plan, 2001, La documentation Française, p. 188.

(6) R. Sennett, Respect. De la dignité de l’homme dans un monde d’inégalité, 2003, Albin Michel, p. 50.

(7) P. Noblet, Quel travail pour les exclus ? Pour une politique de l’insertion durable, 2005, Dunod, p. 164.

(8) « Participant à la politique de la jeunesse, fidèles à notre vocation d’éducation populaire et de promotion sociale, nous adoptons une approche globale et individualisée de chaque jeune, en utilisant, à partir de l’habitat, les atouts de la vie collective enrichie par un brassage délibéré favorisant la rencontre et les échanges entre jeunes et usagers, encourageant les solidarités de proximité issues de la multiplicité des expériences, des situations, des perspectives qui sont celles de tous nos publics. » (Charte UNHAJ, 2 février 1996).

(9) « La vision des Centres sociaux et socio-culturels ne fractionne pas la vie humaine en autant de segments qu’il y a d’administrations ou de prestataires de service : elle identifie ce qui fait la globalité de l’existence individuelle et des situations collectives. » (Charte fédérale des centres sociaux et socio-culturels de France, 17-18 juin 2000).

(10) La Charte des principes fondamentaux énonce que l’objectif d’une E2C est d’assurer l’insertion professionnelle et sociale de jeunes en difficulté et, dans son point IV, on y lit que « L’action pédagogique est souple, centrée sur chaque stagiaire, et combine {…} l’acquisition de compétences sociales qui permettent l’insertion dans de bonnes conditions dans la vie professionnelle mais aussi citoyenne… »

(11) Un directeur de mission locale conteste ce « mis en difficulté », préférant « jeunes en recherche d’autonomie ». Commentaire du 5 octobre 2010, https://plabbe.wordpress.com/2010/10/02/positions-postures-et-enjeux-des-intervenants-sociaux-de-mission-locale-face-a-une-jeunesse-incertaine/ ).

(12) A. Touraine, Critique de la modernité, 1992, Fayard.

(13) « Cette césure qui fait dire à certains que l’insertion est en fait une sorte de machine à trier des populations en référence au marché de l’emploi correspond à l’internalisation de la coupure entre l’économique et le social. Il est faux de dire que l’insertion refuse cette coupure ou l’abolit, simplement la coupure est là toujours présente à l’intérieur même des structures qui travaillent à l’insertion des populations. » C. Guérin-Plantin, Genèses de l’insertion. L’action publique indéfinie, 1999, Dunod, p. 208.

(14) B. Schwartz, L’insertion professionnelle et sociale des jeunes, {1981}, 2007, Apogée, p. 40.

(15) « La notion contemporaine {de personne} renvoie à l’individualité morale, physique et juridique associée à une conscience de soi et d’autrui. La personne est un système de représentations valorisées. », C. Bernatet, L’insertion est une relation, 2010, Les éditions de l’Atelier, p. 57.

(16) « L’insertion – état peut ainsi être conçue comme la visée et l’aboutissement de l’insertion – processus. » P. Labbé, Les bricoleurs de l’indicible. De l’insertion en général, des missions locales en particulier, 2003, Apogée, p. 193).

(17) M. Autès, Les paradoxes du travail social, 1999, Dunod, p. 268. Mireille Berbesson et Binh Dô-Coulot ne sont guère éloignés de cette thèse. Après avoir indiqué que, dans leur ouvrage de 1995( Accompagnement social et insertion, COPAS, 1995, Syros, collection UNIOPSS), l’accompagnement social procédait « d’une démarche volontaire », qui devait se retrouver « dans les modalités de contractualisation », que la relation avec l’usager était « basée sur la confiance et la réciprocité », qu’il reposait « sur une éthique d’engagement réciproque entre des personnes » ainsi que « sur une éthique de la responsabilité » visant « à éviter les dérives possibles de l’assistance ou du contrôle social », ces auteurs, constatant que « l’intervention sociale a fortement évolué depuis dix ans, à la fois stimulée par une évolution sociale augmentant les prérogatives des usagers, et confrontée à une augmentation des flux de ces mêmes usagers », avancent que les pratiques actuelles d’accompagnement social sont nées d’un double renoncement des travailleurs sociaux : « Renoncement à l’objectif de « promouvoir » TOUS les demandeurs ; renoncement à une maîtrise unilatérale sur l’usager et son parcours « obligé » (op. cit., 2003, pp. 6-7).

(18) Dans « 1972-1998 : les nouvelles donnes du social » (Esprit, mars-avril 1998), Jacques Donzelot et Joël Roman ne sont pas plus « tendres » que Michel Autès dans leur critique de l’insertion : « Le problème de ces nouveaux professionnels n’est plus de dénoncer la société mais de la produire, c’est à dire d’obtenir des jeunes l’acceptation des normes nécessaires à la transmission des connaissances, à l’exercice d’une tâche, au respect des autres… » (p. 10) et « En quoi consiste le travail des spécialistes de l’insertion, sinon à faire rentrer une personne dans l’ordre productif quand une autre s’en trouve rejetée, le solde des exclus et précaires en tout genre restant, au mieux, stationnaire ? » p. 21). Cependant il resterait à démonter que les travailleurs sociaux traditionnels dénonçaient la société, une frange sans doute mais pas l’ensemble des professions… et surtout pas les « socio-clercs » (A.-M. Beyssaguet, M. Chauvières, A. Ohayon, Les socio-clercs. Bienfaisance ou travail social, 1976, Maspero)  D’autre part, assimiler l’insertion à une entreprise de normalisation, c’est neutraliser et même éliminer toute la dynamique de changement et d’émancipation qui est au cœur du projet de l’insertion et de son géniteur, Bertrand Schwartz.

(19) Le quartier d’Alma-Gare, à Roubaix, fût un enjeu hautement symbolique de démarche participative s’opposant à la planification urbaine. On peut lire Michael James Miller, « Le quartier comme enjeu social et politique : Alma-Gare dans les années soixante-dix », Genèses n°48, 3/2002, pp. 77-99 (www.cairn.info/revue-geneses-2002-3-page-77.htm.).

(20) « Le monde de Pierre Bourdieu est un monde de luttes inexorables, inexpiables, permanentes, éternelles, sans aucun répit, sans issue. » Jeannine Verdès-Leroux, Le Savant et la politique. Essai sur le terrorisme sociologique de Pierre Bourdieu, 1998, Grasset et Fasquelle, p. 13.

(21) J.-P. Gaudin, « Le sens du contrat dans les politiques publiques », Esprit, février 2001, Entre la loi et le contrat, p. 114.

(22) J.-N. Chopart, Les mutations du travail social, 2000, Dunod, p. 2.

(23) B. Schwartz, op. cit., p. 37.

(24) L’expression « entrepreneurs de morale » est de Howard S. Becker dans Outsiders (1985, A.-M. Métailié). Becker distingue ceux qui créent les normes et ceux qui les font appliquer. L’entrepreneur de morale de cette seconde catégorie doit « justifier l’existence de son emploi et, deuxièmement, gagner le respect de ceux dont il s’occupe. » (p. 180). Ce respect est moins conquis par l’affichage d’un statut ou par une mission officielle dévolue, comme par exemple un mandat justice pour un éducateur d’AEMO, que par le respect que l’intervenant social lui-même exprime à l’usager.

(25) P. Auer, G. Besse, D. Méda, Délocalisations, normes du travail et politique d’emploi. Vers une mondialisation plus juste ?, 2005, La Découverte, p. 25.

(26) Evidemment le maintien dans l’emploi de la personne, qui plus est lorsqu’elle est jeune, participe désormais plus du vœu que de la réalité, singulièrement avec les « FPE », formes particulières d’emploi : « En 20 ans, de 1985 à 2005, la progression des formes particulières d’emploi est relativement rapide. Les niveaux restent tout compte fait assez modérés, concernant les emplois temporaires, les emplois aidés où l’apprentissage. La plus forte progression est celle de l’intérim  dont le poids dans l’emploi total a été presque multiplié par 4. {…} Le poids des emplois à temps partiel a plus que doublé de 1982 (8,2% des salariés) à 2005 (17,9%). {…} Les raisons de la croissance apparemment irrésistible sur le long terme du poids des formes particulières d’emploi sont bien connues. Tout le monde s’accorde à juger qu’aujourd’hui, dans un contexte de compétition internationale très vive, la flexibilité de l’emploi est devenue incontournable. » (C. Kornig, F. Michon, Les formes particulières d’emploi en France : un état des lieux, 2010.82, Documents de travail du Centre d’Economie de la Sorbonne, pp. 10-11). Et : « Les premières années des jeunes Français sur le marché du travail se caractérisent par la prévalence très élevée de formes d’emploi temporaires (CDD, intérim, stages et contrats aidés), entrecoupées de périodes de chômage. Avec désormais 80 % des entrées en emploi, le CDD est devenu la forme normale de l’embauche des jeunes. Bien que le code du travail limite en principe leur usage à des cas précis (emploi saisonnier, pic d’activité, remplacement d’un salarié absent), il est notoire que le CDD et l’intérim sont massivement utilisés comme « super – période d’essai » ou pour permettre à l’employeur de disposer, à côté de son personnel stable, d’un volant de main-d’œuvre flexible. Outre les jeunes, les femmes revenant sur le marché du travail après une période d’inactivité et les immigrés sont également surexposés à ces contrats précaires. » (G. Allègre, A. Marceau et M. Arnov, L’autonomie des jeunes au service de l’égalité, Terra Nova, novembre 2010, p. 15).

(27) J. Piaget, B. Inhelder, De la logique de l’enfant à la logique de l’adolescent. Essai sur la construction des structures opératoires formelles, 1965, PUF.

(28) J.-P. Boutinet, Anthropologie du projet, 1999, 5ème édition, PUF, p. 261.

(29) « La hausse du nombre de postes ouverts et les difficultés de recrutement éventuellement associées seront dans les années qui viennent un élément important de transformation des modes d’organisation du travail et des profils d’embauche. », O. Chardon, M-C.Estrade, F. Toutlemonde, « Les métiers en 2015 : l’impact du départ des générations du baby-boom, Premières synthèses, DARES, n°50.1, décembre 2005.

(30) C. Baron, P. Nivolle, « L’inventivité au quotidien des missions locales et PAIO », Premières synthèses, DARES, n°34.1, août 2005. M.-C. Bureau, C. Leymarie, « Innover dans le social : l’exemple des missions locales », Connaissances de l’emploi, CEE, n°12, février 2005. Rappelons que, pour les missions locales, l’innovation est posée non comme une possibilité ou un souhait mais bien comme une obligation, un « devoir », dans la Charte de 1990.

(31) S. Mas, « Bilan de 5 ans de programme Trace : 320 000 jeunes en difficulté accompagnés vers l’emploi », Premières synthèses, DARES, n°51.1, décembre 2004. Cette question a été explicitement posée par M. Larcher lors de la journée « Dynamisons l’accès à l’emploi des jeunes » le 22 mars 2006 : « Faut-il accompagner l’après-CIVIS ? »

(32) R. Castel, «Du travail social à la gestion sociale du non-travail », Esprit, mars-avril 1998,  A quoi sert le travail social ? p. 42.

(33) D. Castra, L’insertion professionnelle des publics précaires, 2003, PUF.

(34) P. Labbé, « Lectures », 8 septembre 2010, https://plabbe.wordpress.com/2010/09/08/lectures/

(35) « Ils {les jeunes gens} ne doivent pas oublier que le seul moyen de varier leurs connaissances professionnelles est le voyage sans lequel beaucoup d’entre eux ne pourraient acquérir le degré de perfection que doit avoir un bon ouvrier. » Congrès compagnonnique de Lyon, 1er et 3 novembre 1874, cité par E. Martin Saint-Léon, Le compagnonnage. Son histoire, ses coutumes, ses règlements et ses rites, 1983, Librairie du Compagnonnage éditeur, p. 190.

(36) L. Boltanski, E. Chiapello, Le nouvel esprit du capitalisme, 1999, Gallimard, pp. 445-446.

(37) P. Labbé, « Bouger pour s’insérer ? », contribution aux journées nationales de l’UNML, ANDML, novembre 2010.

(38) F. Dubet, Le déclin de l’institution, 2002, Seuil, p. 356.

(39) F. Dubet, id., p. 345.

(40) J.-P. Boutinet, op. cit. ; F. Dubet, « Pour une définition des modes d’adaptation sociale des jeunes à travers la notion de projet », Revue française de Sociologie, 1973, XIV ; H. Rodriguez-Tome et F. Bariaud, Les perspectives temporelles à l’adolescence, 1987, PUF.

(41) J.-P. Gaudin, op. cit., p. 118.

(42) « En ce qui concerne leur domaine propre, les organismes d’éducation populaire, de développement culturel et de jeunesse rappellent que l’éducation ne consiste pas essentiellement en un transfert de connaissance ou en la transmission d’un contenu immuable, mais surtout dans la formation d’individus aptes à prendre en charge leur propre destin et à contribuer à la transformation nécessaire de la société. », Déclaration des associations de jeunesse, d’éducation populaire et de développement culturel, 27 mai 1968, in (dir.) Geneviève Poujol , Education populaire : le tournant des années 1970, 2000, L’Harmattan, p. 223.

(43) Lev Semyonovich Vygotski, Conscience, inconscient, émotions, 2003, La Dispute, p. 74.

(44) Jean-Paul Sartre, cité par Vincent de Gaulejac, « Malaise dans la civilisation », Empan n° 50, Jeunesse et génération(s), jeunesse et transmission, juin 2003.

(45) op. cit. p. 41.

(46) I. Astier, op. cit., p. 10.

(47) I. Astier, id., pp. 129-130.

(48) « Les stratégies d’acteurs construisent des « mondes de l’insertion » permettant de coordonner des acteurs de l’entreprise, des intermédiaires de l’emploi, des partenaires éducatifs et des segments de jeunes socialement identifiables. Ces réseaux transversaux rassemblent des personnes qui partagent, peu ou prou, les mêmes références, les mêmes conceptions du travail et de la formation, les mêmes expériences et qui déploient des stratégies plus ou moins bien coordonnées. », C. Dubar, « La construction sociale de l’insertion professionnelle », Education et Sociétés n° 7, 2001/1, p. 33.

(49) Notons, en ce qui concerne la fréquence des entretiens, qu’il faut éviter de raisonner mécaniquement, plus la fréquence étant élevée, mieux cela étant pour l’accompagnement. Comme l’écrit le rapport de la Cour des Comptes pour le PARE-PAP « le nombre d’entretiens à réaliser a pesé sur l’organisation du travail dans les agences locales et la qualité de l’entretien s’en est ressentie. » (L’évolution de l’assurance chômage : de l’indemnisation à l’aide au retour à l’emploi, Synthèse du rapport public thématique, mars 2006, p. 10).

(50) Ces quatre personnages sont distingués pour la compréhension mais, bien sûr, sont interdépendants. Alain Touraine exprime ainsi cette interdépendance entre le Sujet et l’Acteur : « Le Sujet est le passage du Ca au Je, le contrôle exercé sur le vécu pour qu’il ait un sens personnel, pour que l’individu se transforme en acteur qui s’insère dans des relations sociales en les transformant, mais sans jamais s’identifier complètement à aucun groupe, à aucune collectivité. Car l’acteur n’est pas celui qui agit conformément à la place qu’il occupe dans l’organisation sociale, mais celui qui modifie l’environnement matériel et surtout social dans lequel il est placé » en transformant la division du travail, les modes de décision, les rapports de domination ou les orientations culturelles. », op. cit., p. 243.

(51) « Si l’on distingue ainsi plusieurs sphères, raisonnant par commodité en termes de séparabilité, le plus important demeure toutefois invisible. En filigrane, il est en quelque sorte une deuxième peau qui recouvre ces dimensions, qui les infiltre, les imprègne et les unit (complexus : « ce qui relie »). Ce tissage est présent à l’échelle du sujet qui, à vrai dire, n’a que faire de la disjonction de l’économie, du social, de la sociabilité et de l’individuation. Ce sujet sait bien que tout est dans tout et que, si quelque chose est défaillant ici, ce que l’on appelle les interdépendances fera que cela dysfonctionnera là, puis partout par contamination. » M. Abhervé, P. Labbé (dir), L’insertion professionnelle et sociale des jeunes ou l’intelligence pratique des missions locales, 2005, Apogée, p. 91. Cette typologie « individuation – sociabilité – sociétal – économique » a été plus développée par P. Labbé dans « Qu’est-ce que le social ? », CPNEF Branche professionnelle des acteurs du lien social et familial, Veille, Projet, Evaluation, 2009, pp. 81-100.

(52) François Dubet, Sociologie de l’expérience, 1994, Seuil, p. 253. Dans la logique de l’intégration, l’acteur se définit par ses appartenances, vise à les maintenir ou à les renforcer au sein d’une société considérée alors comme un système d’intégration. Dans la logique de la stratégie, l’acteur essaie de réaliser la conception qu’il se fait de ses intérêts dans une société conçue alors « comme » un marché. Dans le registre de la subjectivation sociale, l’acteur se représente comme un sujet critique confronté à une société définie comme un système de production et de domination. » (p. 111).

(53) Le concept d’individuation, emprunté à la psychanalyse jungienne, recouvre le fait d’être vraiment soi, tout ce que l’on est et seulement ce que l’on est : « La voie de l’individuation signifie : tendre à devenir un être réellement individuel et, dans la mesure où nous entendons par individualité la forme de notre unicité la plus intime, notre unicité dernière et irrévocable, il s’agit de la réalisation de son Soi, dans ce qu’il a de plus personnel et de plus rebelle à toute comparaison. » (C. G. Jung, Dialectique du Moi et de l’Inconscient, 1993, Gallimard, http://fr.wikipedia.org/wiki/Individuation ). Son paradigme est donc l’autonomie (autonomos : « gouverner selon sa propre loi »), la méta-valeur que l’individuation appelle est la liberté et la distance d’interaction est petite : de l’individu lui-même (intégrité physique et psychique) à sa famille (conjoint-te, ascendants, descendants). La personne est « sujet », ce qui signifie que sa singularité est privilégiée sans toutefois que celle-ci soit indépendante du contexte, de l’environnement : « … le sujet inscrit son action dans un cadre social contraignant, dans une histoire personnelle et structurante, ce qui n’enlève en rien à sa possibilité de choix et ne remet pas en cause, a posteriori, de tendances. Si chaque sujet peut a priori tout faire, il ne fait pas n’importe quoi car il existe des régularités et des contraintes dans les actions en société, des tendances qui distinguent les groupes sociaux. Si chacun est potentiellement doué de stratégie, le contexte social ne permet pas toujours et pas également de développer cette capacité. » (J. Rose, Les jeunes face à l’emploi, 1998, Desclée de Brouwer, p. 70). Le sujet est donc unique, original, mais cette singularité s’inscrit aussi un habitus social, « emprunte sociale commune du comportement individuel » pour reprendre la formule de Norbert Elias. Pour Edgar Morin, « Nous autres, êtres culturels et sociaux, nous ne pouvons être autonomes qu’à partir d’une dépendance originelle à l’égard d’une culture, à l’égard d’un langage, à l’égard d’un savoir. L’autonomie est possible non pas en termes absolus mais en termes relationnels et relatifs. » (E. Morin, La tête bien faite. Repenser la réforme, réformer la pensée, 1999, Seuil, p. 145). Morin identifie quatre principes de définition du sujet : « l’égocentrisme au sens littéral du terme : se mettre au centre de son monde » [p. 147] ; la permanence de l’auto-référence, « le sujet reste le même. Il dit simplement « j’étais enfant», «j’étais en colère», mais c’est toujours le même «je» alors que les caractères extérieurs ou psychiques de l’individualité se modifient. » [p. 148] ; l’exclusion qui « peut s’énoncer ainsi : si n’importe qui peut dire « je », personne ne peut le dire à ma place. » [p. 148] ; enfin de principe d’inclusion : « Je peux inscrire un « nous » dans mon « je », comme je peux inclure mon « je » dans un « nous ». » [p. 148].

(54) Empruntant les notions de « sociabilité primaire » et « secondaire » à Alain Caillé, Robert Castel définit la première comme « les systèmes de règles liant directement les membres d’un groupe sur la base de leur appartenance familiale, de voisinage, de travail, et tissant des réseaux d’interdépendances sans la médiation d’institutions spécifiques.» (Robert Castel, Les métamorphoses de la question sociale, 1995, Arthème Fayard, p. 49). Cette sociabilité primaire s’observe (-vait?) dans les sociétés paysannes, de type « solidarité mécanique » pour reprendre la terminologie durkheimienne. Par contraste, la sociabilité secondaire est celle des sociétés où il existe une spécialisation des activités (division du travail et du social, « solidarité organique ») et des médiations institutionnelles, ce qualificatif devant être compris au sens large des corps intermédiaires. La sphère de la sociabilité correspond donc ici au champ des relations autres que celles de la famille et inclut le voisinage, les amis, les personnes avec lesquelles le sujet est impliqué dans des activités multiples telles que les loisirs, le travail, l’engagement militant, etc. On pourrait aussi avec Jean Baechler distinguer la sociabilité et la « sodalité ». Cette dernière désigne des groupes dont les membres poursuivent des buts communs alors que la sociabilité est plus volatile et peut tout simplement recouvrir le plaisir d’être ensemble : « C’est pourquoi le phénomène le plus typique de la sociabilité humaine est peut-être la conversation. » in « Groupes et sociabilité », (dir.) Boudon R., Traité de sociologie, 1992, PUF, p. 73.

(55) Le concept de « liens faibles » a été développé par le sociologue américain Mark Granovetter dans sa thèse de sociologie en 1985, Getting a job : les actions que les acteurs entretiennent pour atteindre un objectif sont encastrées dans un système concret et continu de relations sociales et, par exemple, pour trouver un emploi, il vaut mieux disposer d’un réseau large de personnes avec lesquelles on a des relations superficielles qu’un petit noyau de relations solides, « liens forts », certes stables mais généralement constituées d’individus (famille, amis proches) qui n’offrent pas un spectre large d’opportunités puisqu’elles ne connaissent que les mêmes personnes (l’embeddedness). En conséquence, la force que représente un intervenant social réside dans sa position de « marginal-sécant » au bénéfice de ses usagers : capable de participer à des groupes et à des réseaux différents, il permet aux personnes de se rencontrer, d’élargir le cercle de leurs relations et, corrélativement, le champ des opportunités. Les travaux de Granovetter ont été développés dans le cadre de la théorie de la médiation, en particulier par Yves Barrel.

(56) L’adjectif « sociétal » est emprunté à l’anglais, l’édition 1993 du Petit Robert le proposant avec la définition suivante : « relatif aux valeurs et aux institutions de la société ». Le Dictionnaire de la comptabilité et de la gestion financière de Louis Ménard (Dictionnaire de la comptabilité et de la gestion financière, Toronto, Institut Canadien des Comptables Agréés, 1994), sous la rubrique « social accounting », définit le bilan social comme un « document récapitulant les principales données chiffrées qui permettent d’apprécier la situation de l’entité dans le domaine social », et l’auteur, dans une note, établit une distinction entre « information sociale » et « information sociétale » : la première regroupe les données relatives au fonctionnement social de l’entreprise, touchant notamment la rémunération, les conditions physiques d’emploi, la sécurité, la formation du personnel ; la seconde est réservée aux informations communiquées par l’entreprise en réponse aux actions menées par différents groupes de pression, en particulier les mouvements écologistes et de défense des consommateurs. La notion de « sociétal » a connu un fort essor avec les thématiques du développement durable et de la responsabilité sociale ou, précisément, sociétale de l’entreprise, celle-ci étant comprise comme un processus permanent d’amélioration dans le cadre duquel les entreprises intègrent de manière volontaire, systématique et cohérente des considérations d’ordre social, environnemental et économique dans la gestion globale de l’entreprise ; à cet égard, la concertation avec les parties prenantes de l’entreprise fait partie intégrante du processus. L’Index international et dictionnaire de la réadaptation et de l’intégration sociale (IIDRIS) définit l’attitude sociétale comme les « Opinions et points de vue généraux et spécifiques qu’ont les membres d’une culture, d’une société, de groupement sous-culturels ou autres sur la personne considérée ou sur d’autres sujets (par ex. enjeux sociaux, politiques et économiques) qui influent sur le comportement et les actes individuels. » (www.med.univ-rennes1.fr/iidris/cache/fr/7/782 ).

(57) L’emploi est entendu aujourd’hui, de façon quasi-exclusive, comme l’emploi dans le secteur marchand. Cette conception étriquée devrait a minima s’élargir à l’emploi public et à l’emploi du tiers secteur (économie sociale).

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