Maisons de l’emploi : des conclusions à la nanoseconde…

Publié: Mai 14, 2008 dans Politiques d'emploi

Mardi 13 mai à Paris, AVE (Alliance Villes Emploi), le réseau d’animation des maisons de l’emploi et des Plie (plans locaux pour l’insertion et l’emploi) organisaient un débat sur le thème « Politique de l’emploi en devenir ». Y participait, entre autres, Jean-Paul Anciaux, député UMP de Saône-et-Loire, président de la Commission nationale de labellisation des maisons de l’emploi et auteur d’un amendement à la loi relative au SPE du 13 février 2008 qui a permis d’intégrer les maisons de l’emploi (ME) au Conseil national de l’emploi et conseils régionaux de l’emploi du nouvel opérateur unique issu de la fusion ANPE/Assedic, dont la mise en oeuvre effective est prévue pour le 1er janvier 2009. Jean-Paul Anciaux a été chargé par Christine Lagarde, ministre de l’Économie, de l’Industrie et de l’Emploi, de procéder à une évaluation des ME et de proposer un nouveau cahier des charges pour une nouvelle génération de ME. Le député avait transmis à la ministre un rapport d’étape en janvier 2008 et doit lui remettre son « rapport définitif dans quatre semaines » sur la base de six monographies de ME.

« Dès que le rapport lui sera remis, la ministre s’est engagée à ce que toutes les conventions financières [entre l’État et les ME] soient signées », a précisé Jean-Paul Anciaux aux élus présents dont les structures labellisées sont encore « gelées » financièrement suite à l’annonce, fin 2007, de la refonte du SPE.

Laurent Wauquiez, secrétaire d’État en charge de l’Emploi, a précisé qu’il a demandé à la DGEFP « d’accélérer ce processus » afin que « l’essentiel [des structures] ou une masse critique [d’entre elles] soient conventionnées avant la trêve estivale ». Le but est que « plus de 200 maisons de l’emploi soient conventionnées d’ici la fin de l’année ».

Les ME apportent « deux choses extrêmement précieuses : la connaissance du terrain (celle du bassin d’emploi et du bassin de vie) et un rôle de coordination sur les territoires entre les différentes branches de la politique de l’emploi », a ajouté le secrétaire d’État. Le rôle des ME aux côtés de la nouvelle entité issue de la fusion ANPE/Assédic sera définie par une convention qui doit être « passée par l’AVE et l’État dans le prolongement du rapport Anciaux », a précise Laurent Wauquiez. « Cette convention permettra également de préciser la contribution de l’Alliance Villes Emploi dans l’animation des maisons de l’emploi. »

Pour Marie-Christine Dalloz, député UMP du Jura, présidente de la mission d’information parlementaire relative aux maisons de l’emploi, les ME constituent « un apport indéniable sur un territoire ». « Il y a pléthore de dispositifs et de structures en matière d’emploi. Les maisons de l’emploi apportent de la cohérence », estime-t-elle. Elle suggère de « simplifier » ce réseau de structures locales afin d’apporter de la « clarté » et de l’ « efficacité » et propose que « les missions locales et les Plie soient complètement intégrés aux maisons de l’emploi ».

Pour Jean-Paul Anciaux également, « les Plie ont vocation à intégrer les maisons de l’emploi et, in fine, à se fondre dans les maisons de l’emploi; et de la même façon, les mission locales à terme ». « Je vois mal », dit-il, « d’un côté le nouvel opérateur et de l’autre, les missions locales, les Mife (maisons de l’information sur la formation et l’emploi), etc ». De son côté, l’AVE a proposé que les ME « fédèrent tous les dispositifs gérés par les communes et les établissements publics de coopération intercommunale: Plie, missions locales, Mife sur un territoire de type bassin d’emploi. »

Pour Laurent Hénart, député UMP de Meurthe-et-Moselle, adjoint au maire de Nancy, délégué au Plie et à la mission locale, il faut également que « la maison de l’emploi intègre le Plie et la mission locale. Mais pour cela, elle a besoin d’être aidée par le ministère du travail, le nouvel opérateur et les associations d’élus ». Pour l’ancien ministre, « tout le monde peut être gagnant à ce que la maison de l’emploi soit la somme de toutes les initiatives locales ».

Seul Michel Bernard, ancien directeur général de l’ANPE et actuel président de la maison de l’emploi Evry/Corbeil/Essonne, n’a pas partagé l’avis général consistant à vouloir intégrer les missions locales dans les ME : « On donnerait à ces dernières un rôle majeur de producteur de services. Or, il faut préserver au maximum la mission des ME qui consiste à être un lieu de gouvernance des politiques de l’emploi au niveau local. »

Pour Jean Gaeremynck (DGEFP), il faudra profiter de la réforme en cours (RGPP) et de celle du SPE pour « redéfinir le positionnement des missions locales et du réseau Cap emploi (en faveur des travailleurs handicapés), en particulier ». Le chantier qui s’ouvre devrait permettre « d’améliorer l’offre de services de structures comme les missions locales, en lien avec le nouvel opérateur. »(1)

 

Que les élus aient un projet politique est bien la moindre des choses et non seulement respectable mais souhaitable. Que les institutions relaient ce projet est dans la norme. Toutefois, ce qu’il faut savoir, c’est que les six monographies réalisées pour le rapport final d’évaluation des maisons de l’emploi ont été adressées à la DARES… le jour même, mardi 13 mai, où se tenait cette rencontre. En d’autres termes, leurs contenus et leurs conclusions étaient par la force des choses inconnus des différents protagonistes… ce qui ne les a pas empêché d’arrêter le scénario du devenir des maisons de l’emploi. Mettre en avant le principe de gouvernance, de politiques territorialisées impliquant la consultation et la participation des acteurs locaux et donner les conclusions avant que celles-ci soient connues… comment cela s’appelle-t-il ? Confondre vitesse et précipitation ? S’asseoir dans les faits sur un principe que l’on promeut ? A moins qu’il s’agisse d’un don de clairvoyance combiné à une réactivité à la nanoseconde.

Ce monde est extraordinaire. Il y a vraiment parmi nous des hommes avec des super-pouvoirs et M. Vincent (« Les Envahisseurs ») avait raison : regardons attentivement leurs petits doigts (2)…

 

 


(1)  Ceci six mois à peine après que soient mises en place entre l’État et les missions locales les conventions pluriannuelles d’objectifs (CPO)… qui structurent et définissent l’offre de services en cinq « axes ».

(2) « Les envahisseurs », série culte à la télévision des années 70. M. Vincent, le héros, était le seul à être conscient de la présence d’extra-terrestres parmi les humains, dont l’objectif était d’asservir ces derniers. Rien ne distinguait ces envahisseurs sinon une rigidité dans le petit doigt…

 

commentaires
  1. Le bateleur dit :

    Récemment je demandais à un ami de me citer une réforme qui ne consiste pas en « la suppression de quelque chose »
    il n’y est pas parvenu

    Etrange,
    ces gens
    qui ont le droit au qualificatif de « réformateur »
    et qui pourtant n’agissent qu’en supprimant l’existant
    autrefois on les nommait
    des barbares

  2. Benoit Willot dit :

    Merci de ce compte-rendu très instructif, que je me permettrai de citer.

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